Journal Ordinaire D'Un Jardinier Ordinaire

 «Sapins»

Bonjour

Nous voici arrivés à une époque funeste pour les dindes et les sapins. Les unes dépouillées de leur plumage et farcies de marrons vont passer par le four de la cuisine pour faire honneur aux repas gargantuesques des fêtes de fin d'année. Pour les autres, qui coulaient des jours tranquilles au plus profond de nos forêts, c'est d'abord le bruit de la scie qui a suscité la terreur parmi ces résineux. Au chuintement discret de la scie à bois ou du halètement alternatif du passant à grumes, s'est substituée le hurlement tonitruant de la tronçonneuse à moteur thermique. Point d'échafaud pour notre malheureux sapin, mais le nez violemment précipité dans la neige glacée, par le cruel outil de la déforestation. Embarquement immédiat vers un lieu de vente destiné à fournir le public en arbuste de Noël. Oui! Ce sont vraiment des arbustes, car ces jeunes abies ou ces juvéniles épicéas ne seront jamais ces grands conifères majestueux, siégeant dignement au cœur de nos forêts profondes et tranquilles. Leur destin n'est guère enviable. Destinés à trôner près de la cheminée et décorés de toutes sortes de colifichets brillants et colorés , de guirlandes étincelantes et électriques, de boules en verre soufflé, multicolores et fragiles, nos arbustes de Noël vont rapidement faire les frais de l'ambiance torride et desséchée des logis en cette période de fin d'année. Chaque jour les aiguilles de ces hôtes éphémères de nos foyers, vont se répandre sur le sol des maisons décorées et  embellies pour ces circonstances festives. La nuit de Noël, chargés des cadeaux, déposés par un certain personnage à la barbe blanche et de rouge vêtu, ces pinacées, feront brièvement briller les yeux des petits enfants. Ensuite, au fil des jours, ayant perdu pratiquement toutes leurs aiguilles, ces témoins de nos meilleures heures de joie et de fête, vont terminer dans la cheminée toute proche, sans autre forme de procès, sans tambour, ni trompette. Feu de joie,  pétillant et pétaradant d'escarbilles et de flammèches, caractéristique essentielle de la combustion des résineux. C'est pourquoi, il y a quelques années, je me suis résolu à offrir un autre destin au sapin destiné à décorer notre logis de fête. Afin de disposer rapidement de jeunes arbres pour embellir notre terrain, nous avons acheté chaque année un arbre de Noël vendu avec ses racines. Racines elles-mêmes encore en mottes, protégées avec une robuste tontine en paille. Ces sapins étant d'un coût plus important que les sapins sommairement tronçonnés, nous avons toujours acquis des arbres de petites tailles. Ces petits sapins se sont rapidement développés. Ces sujets ne font pas plus de un mètre de haut, lorsque l'on les achète. Il est préférable de les garder, le moins longtemps possible, dans la maison, près de la cheminée. Ces sapins ont grandi; lorsqu'ils ont dépassé les trois mètres, il a fallu les abattre; plus exactement, on a demandé aux agents communaux de les abattre pour garnir la salle des fêtes au moment de la fête de Noël. Par la suite nous avons planté des arbres et des arbustes, d'essences plus nobles, que ces charmants petits épicéas. Avant de planter ces sapins près de l'aire de jeux des enfants, j'avais planté des jeunes pousses de pin noir d'Autriche, que l'on peut se procurer facilement en bordure de certaines routes dans notre région. Ces arbustes se développant très vite, mais ayant rapidement un port et une allure qui ne convenaient pas à mes goûts, je me suis tourné vers la culture du sapin de Noël en tontine. Comme le temps passe vite, lorsqu'il y eut six ou sept sapins sur cet emplacement il a fallu se résoudre à employer la méthode décrite plus haut dans cet article Dans mon jardin, il y a deux autres représentants de ce genre de conifères. Un sapin très nain qui ne se développe que de quelques centimètres par an et un grand sapin aux reflets verts un peu bleutés.  Abies Nobilis Glauca était-il inscrit sur sa carte d'identité. Je devrais plutôt mentionner sur son passeport décrivant son berceau d'origine; à savoir les états d'Oregon et de Washington; sis en Amérique, comme chacun sait. Cette variété de sapin était promotionellement offerte pas les pépinières Derly. Comme cette opération publicitaire fut unique, je pense qu'il n'y a pas beaucoup de représentants de cette variété sur notre territoire. Voici sa description. «Originaire des Etats de l'Orégon et de Washington. Espèce introduite vers 1827 en Angleterre par Douglas. Arbre de 40 à 45m (80m ds son milieu de prédilection) au port conique, à cime étroite. Jeunes rameaux à courte pubescence de couleur rouille. Bourgeons petits, globuleux, brun violacé et peu résineux. Feuilles de 25 à 35mm, à base décurrente, en brosse, inclinée vers l'avant, concolores, glauques, avec deux bandes de simages sur chaque face, section +/- quadrangulaire et base tordue. Cône cylindrique de 15 à 25cm de long sur 8 à 10cm de diamètre, verdâtre ou pourpre avant maturité, avec bractées saillantes ». Ses cônes sont particulièrement lourds et volumineux et reviennent en grand nombre chaque année. Pour ceux qui ne le savaient pas (moi-même, je l'ai découvert récemment) L'état de Washington, ville principale Seattle (usines Boeing), se situe à près de 4000 kilomètres de la ville de Washington (District de Columbia) et capitale des Etats Unis. C'est là une particularité géographique de nos amis Américains. Après cette petite promenade dans le nouveau monde, je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d'année.

Bon Dimanche